Après avoir exposé les différentes étapes de la procédure relative à l’acquisition de l’avion présidentiel et des équipements militaires, le parquet a affirmé que l’ancienne ministre de l’Économie et des Finances, Mme Bouaré Fily Sissoko, l’ancien directeur du Commissariat des armées, le colonel-major Nouhoum Dabitao, ainsi que l’ancien directeur des Matériels, des Hydrocarbures et des Transports des armées, le général Moustapha Drabo, savaient parfaitement ce qu’ils faisaient au moment des faits.
Il a rappelé que Mme Bouaré avait consenti une garantie autonome de 100 milliards de francs CFA pour une opération de 69 milliards, en faveur d’une banque, alors qu’elle savait pertinemment que cela n’était pas conforme aux procédures. En réalité, c’était au fournisseur – la société GUO STAR – de fournir cette garantie, et non à l’État malien. Concernant le colonel-major Dabitao et le général Drabo, le parquet a souligné que ce sont eux qui ont formulé les besoins en équipements militaires à la place de ceux qui étaient habilités à le faire, à savoir les unités opérationnelles sur le terrain. « Les copies des besoins n’ont été vues. Ces deux expressions de besoin sont de des faux par excellence. C’est du faux et de l’escroquerie », a-t-il déclaré, avant d’ajouter que « l’essentiel des faits est établi pour condamner Mme Bouaré Fily Sissoko, Moustapha Drabo et Nouhoum Dabitao. L’incrimination de M. Camara est minime. Certes, l’acte qu’il a commis c’est du faux, mais nous n’avons pas la certitude de son implication dans la suite de la procédure ». « En toute honnêteté. Des procès interminables qui finissent toujours par des non-lieux, par des acquittements. Alors cette fois-ci, donnez la voie de la justice, la voie de la légalité. Que l’on sache dorénavant qu’il y a une nouvelle dynamique. Qui pouvait imaginer des ministres, des officiers supérieurs devant la Cour d’assise ? », a-t-il dit, rappelant qu’à l’ère démocratique, cela ne s’était jamais produit.
« L’État a nettement dégagé sa volonté politique de finir avec cette pratique de délinquance financière», a-t-il martelé, insistant sur le fait qu’il revient désormais à la justice de jouer sa partition. Pour le parquet, l’option doit être d’entrer en voie de condamnation contre ces personnes, à l’exception de Mahamadou Camara.
« Vous êtes appelés d’imprimer une nouvelle dynamique dans la gouvernance de ce pays parce qu’aujourd’hui on pense que tout est négociable. La justice est particulièrement attendue dans ces dossiers-là. C’est une première fois. Vous avez les cadres de l’administration malienne, le haut sommet. C’est à ce niveau que c’est pourri. Nous vous demandons de maintenir cette dynamique », a-t-il soutenu, tout en notant que malgré les nombreuses réformes, rien ne semble fonctionner. « Si tout était bien fait de l’indépendance à nos jours, si on fait tout de façon loyale, digne et correcte, le pays n’allait pas se retrouver dans cette situation. Le fait d’acquisition de l’aéronef, aucune règle budgétaire, aucune règle relative aux finances publiques n’a jamais été respectée. Et des prestations ont été faites par des gens qui n’avaient aucun lien avec l’État du Mali. Des sociétés constituées pour les besoins qui n’avaient aucun contrat avec l’État du Mali auxquelles on a payé également. Des cabinets d’avocats constitués pour les besoins de la cause auxquels le Mali n’avait aucun contrat, ont été payés. C’est indéniable. Donc, il y a eu de la fraude », a-t-il indiqué.
Dans son réquisitoire, il a insisté pour que la Cour ne fasse preuve d’aucune pitié ni compassion, et qu’elle agisse en toute conformité avec le droit. Ainsi, concernant l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires, au-delà des seules qualifications de « faux et usage de faux », «atteinte aux biens publics » ou « escroquerie », le parquet général a estimé qu’il s’agissait en réalité d’une véritable « association de malfaiteurs ».
YOUSSOUF KONATE
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