À l’occasion de la Tabaski, l’homme politique malien et entrepreneur Aliou Boubacar Diallo a annoncé, dimanche 8 juin, la création du Front Patriotique de Résistance (FPR), en réaction à la dissolution de tous les partis politiques par la junte au pouvoir.
Dans une déclaration publique mêlant vœux religieux et positionnement institutionnel, l’ancien candidat à la présidentielle de 2018, Aliou Boubacar Diallo dénonce une série de violations de la Constitution et appelle les Maliens à se rassembler autour du respect de l’ordre républicain. Dans la foulée de la création d’un mouvement, le Front patrioque de résistance (FPR).
Le 13 mai 2025, les autorités de transition ont pris un décret abolissant l’ensemble des partis et associations politiques, les accusant d’attiser les divisions et de faire obstacle au processus de refondation nationale. Cette décision s’inscrit dans une séquence amorcée à la fin avril, au lendemain d’une « consultation nationale » controversée, qui avait recommandé l’abandon du multipartisme au profit d’un modèle dit de gouvernance unifiée. La suspension des activités politiques avait été actée le 7 mai, avant que la dissolution ne soit formalisée six jours plus tard. Plusieurs recours formés devant la justice malienne ont été rejetés, la Cour suprême ayant confirmé, le 27 mai, la légalité du décret présidentiel.
Dans ce climat de fermeture politique, Aliou Boubacar Diallo affirme vouloir offrir une réponse républicaine à ce qu’il qualifie de dérive autoritaire. Le Front patriotique de résistance (FPR), qu’il présente comme un mouvement de rassemblement et non un parti politique, entend structurer une opposition fondée sur le droit, la justice et la souveraineté populaire. Dans sa déclaration, il appelle tous les citoyens « de l’intérieur comme de la diaspora » à s’unir contre la confiscation du pouvoir par des voies non constitutionnelles. Il affirme que « la transition doit maintenant prendre fin» et que le retour à un cadre démocratique est une condition de sortie de crise. Le FPR repose sur une initiative baptisée V3R — Vérité, Reconnaissance, Réparation, Réconciliation —que son fondateur articule autour de la nécessité d’un processus de justice transitionnelle. Il évoque la volonté de faire la lumière sur les événements qui ont conduit à la crise actuelle, de reconnaître les souffrances subies, d’engager des réparations pour les victimes, et de restaurer la cohésion nationale à travers une réconciliation inclusive. Le projet s’inscrit également dans une perspective économique : Diallo évoque un plan de relance chiffré à plus de cent milliards de dollars, déjà discuté avec des partenaires internationaux, en attente d’un cadre politique stable et légitime pour se concrétiser. Peu de personnalités politiques maliennes se sont exprimées publiquement depuis la dissolution des partis. La plupart des figures de l’opposition traditionnelle se tiennent à l’écart ou font face à des restrictions administratives. Dans ce contexte, la prise de parole d’Aliou Boubacar Diallo marque un tournant. Elle remet en circulation un discours politique structuré, articulé autour de principes constitutionnels, dans un paysage institutionnel largement suspendu. Le FPR pourrait ainsi devenir le premier pôle de résistance civile assumée depuis la mise à l’écart de la classe politique. Il reste à savoir quelle sera sa capacité réelle de mobilisation, alors que les libertés d’expression et de réunion demeurent limitées. En affirmant que la légitimité populaire « ne disparaît pas avec un décret», Diallo prend le risque d’une confrontation juridique et politique. Mais il ouvre aussi, pour la première fois depuis mai, un espace d’expression encadré, potentiellement rassembleur, à l’intérieur d’un système verrouillé.
MD/Sf/ac/APA
Source : APA
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