Le Bureau du Vérificateur Général (BVG) a levé le voile sur une série d’irrégularités majeures entachant la gestion de l’Ambassade du Mali à Riyadh (Arabie Saoudite), couvrant les exercices 2022, 2023, 2024 et le premier trimestre 2025. Ce rapport accablant, publié en juillet 2025, met en lumière une mauvaise gouvernance manifeste, mêlant confusion des rôles, mauvaise tenue de la comptabilité, et gaspillage des deniers publics.
Une mission diplomatique entachée d’irrégularités
Bamada.net-L’objectif de la mission de vérification était clair : évaluer la régularité des opérations de recettes et de dépenses de l’Ambassade. Cependant, les conclusions du BVG sont alarmantes : 114 561 505 FCFA d’irrégularités financières constatées, dont 103 408 719 FCFA non régularisés à la clôture des travaux.
Le non-respect des règles administratives de base
Parmi les manquements les plus graves, le non-respect de la séparation des fonctions entre l’ordonnateur et le comptable a été relevé. En clair, l’Ambassadeur signait conjointement les instruments de paiement avec le comptable, en violation des textes en vigueur. Ce dysfonctionnement augmente les risques de fraudes, faute de mécanismes de contrôle efficaces.
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Pire encore, les registres comptables réglementaires (livres de caisse, journaux de dépenses, registres bancaires…) n’étaient tout simplement pas tenus, compromettant toute traçabilité des fonds. L’inventaire des biens, pourtant obligatoire, était inexistant, et aucun des matériels de l’Ambassade n’avait été codifié ni immatriculé.
Des pratiques financières douteuses
Le rapport révèle une série de détournements présumés et d’avantages indus :
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47,9 millions FCFA de cotisations sociales perçues et non reversées pour le personnel local, dans un pays où la législation interdit pourtant ces cotisations pour les étrangers.
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22,6 millions FCFA de paiements d’avantages injustifiés au personnel diplomatique : téléphones, abonnements internet personnels, produits alimentaires et même des vêtements.
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9,6 millions FCFA de dépenses comptabilisées deux fois.
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11,4 millions FCFA de dépenses injustifiées, souvent justifiées uniquement par des tickets bancaires sans factures ni précisions sur les services payés.
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11,1 millions FCFA de fausses factures d’entretien de véhicules non appartenant à l’Ambassade.
L’ensemble de ces irrégularités a été signalé au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême ainsi qu’au Procureur de la République du Pôle Économique et Financier, pour des suites judiciaires éventuelles.
Le Vérificateur appelle à une réforme urgente
Au-delà du constat, le BVG formule plusieurs recommandations concrètes :
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La stricte séparation entre l’Ambassadeur (ordonnateur) et le Secrétaire Agent Comptable (exécutant).
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La régularisation des recettes par émission d’ordres de recettes.
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Le reversement systématique des fonds au Trésor Public.
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La tenue rigoureuse de la comptabilité-matières et des registres.
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La codification de tous les biens de l’État dans la représentation diplomatique.
Un signal fort pour la gouvernance publique
Cette vérification sonne comme une piqûre de rappel sur la nécessité de réformer la gestion de nos représentations diplomatiques, souvent perçues comme des zones de non-droit budgétaire. L’ambassade à Riyadh, qui représente pourtant le Mali dans l’un des pays les plus stratégiques du monde musulman, se trouve aujourd’hui éclaboussée par ce scandale financier.
Références :
Bureau du Vérificateur Général du Mali. Rapport de vérification financière de l’Ambassade du Mali à Riyadh. Exercices 2022 à 2025 (31 mars), juillet 2025.
La bonne gouvernance passe aussi par l’exemplarité à l’étranger. Ce rapport, bien que technique, rappelle que la diplomatie ne doit jamais être un refuge pour les pratiques opaques. C’est au gouvernement de la transition d’agir avec fermeté pour que la reddition des comptes soit la règle, et non l’exception.
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BEH COULIBALY
Source: Bamada.net
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