La lutte contre le terrorisme en Afrique de l’Ouest franchit un nouveau cap. Réunis à Abuja, au Nigeria, le 25 août 2025, les chefs d’état-major de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont décidé de créer une brigade antiterroriste de 260 000 hommes. Ce dispositif de déploiement rapide nécessitera un financement annuel estimé à 2,5 milliards de dollars, afin de faire face à la menace sécuritaire croissante qui frappe de plein fouet la région.
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Une menace qui s’intensifie dans le Sahel et gagne les côtes
Bamada.net-Depuis plusieurs années, le Sahel est l’épicentre de la violence terroriste mondiale. Selon l’Indice global du terrorisme, publié en 2024, la région concentrait à elle seule 51 % des pertes en vies humaines liées aux attaques terroristes. Les pays du Sahel central – notamment le Mali, le Burkina Faso et le Niger – restent les plus durement touchés par les assauts des groupes armés, mais la menace s’étend désormais au-delà de ce périmètre.
Des pays côtiers, naguère considérés comme de simples zones tampons, sont aujourd’hui dans la ligne de mire des djihadistes. Le Bénin et la Côte d’Ivoire enregistrent une multiplication des attaques dans leurs zones frontalières, suscitant de vives inquiétudes pour la stabilité régionale.
Cette évolution dramatique a poussé la CEDEAO à accélérer ses efforts pour bâtir une riposte commune et concertée.
Une force régionale d’ampleur inédite
La future brigade antiterroriste sera composée de 260 000 militaires, déployables rapidement dans n’importe quel pays membre confronté à une menace sécuritaire. Ce dispositif ambitionne non seulement de renforcer la protection des populations locales, mais aussi de consolider les frontières fragilisées par la porosité et l’absence de contrôle efficace.
« L’activation de cette force de déploiement rapide est devenue une nécessité en ce qui concerne les dynamiques de sécurité asymétriques dans la région. Nous savons que cette initiative nécessite d’importantes ressources financières et logistiques, mais elle constitue une étape incontournable pour restaurer la stabilité », a déclaré Abdel-Fattah Musah, commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de la Commission de la CEDEAO, représentant le président de la Commission, Dr Omar Touray.
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Outre le déploiement militaire, le budget prévu servira à soutenir financièrement et logistiquement les États les plus exposés, afin de compenser leurs capacités souvent limitées face à la puissance de feu et à la mobilité des groupes terroristes.
De la force en attente à une brigade opérationnelle
Cette annonce marque une continuité dans les initiatives de la CEDEAO. En mars 2025, l’organisation avait déjà proclamé l’activation de sa force en attente, destinée à intervenir contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée. Mais cette fois, il s’agit d’un dispositif plus robuste et structuré, qui ambitionne de répondre non seulement aux urgences, mais aussi aux dynamiques de long terme du terrorisme régional.
Les discussions de ce sommet ont insisté sur l’importance de la coordination inter-étatique et de l’harmonisation des doctrines militaires, afin d’éviter les chevauchements d’initiatives qui avaient souvent fragilisé les tentatives précédentes de coopération sécuritaire.
Une facture lourde, mais un coût de l’inaction encore plus élevé
Le financement de cette brigade représente un défi de taille : 2,5 milliards de dollars par an. Une somme colossale pour une région où de nombreux États font face à des crises économiques, budgétaires et sociales.
Cependant, les experts estiment que le coût de l’inaction serait encore plus lourd. Les attaques terroristes détruisent non seulement des vies humaines, mais également des infrastructures essentielles, aggravent la pauvreté et freinent le développement. L’instabilité chronique réduit les investissements étrangers et compromet les perspectives économiques de l’Afrique de l’Ouest.
Ainsi, pour de nombreux observateurs, investir massivement dans la sécurité régionale est devenu un impératif incontournable.
Prochaine étape : l’approbation politique et financière
Les ministres des Finances et de la Défense des pays membres de la CEDEAO se retrouveront le vendredi 29 août à Abuja pour peaufiner les modalités de mise en œuvre de ce projet ambitieux. Leurs discussions porteront notamment sur la répartition des contributions financières entre États, ainsi que sur la structuration opérationnelle et hiérarchique de la brigade.
La mise en place effective de ce corps régional dépendra donc de la volonté politique des dirigeants ouest-africains et de leur capacité à dépasser les divergences nationales pour construire un véritable front commun contre le terrorisme.
Une décision stratégique pour l’avenir de la région
L’annonce de la création de cette brigade illustre une prise de conscience collective : aucun État de la CEDEAO ne peut, à lui seul, vaincre la menace terroriste. La sécurité régionale nécessite une approche intégrée, solidaire et durable.
Si le projet se concrétise, il pourrait constituer un tournant historique pour l’Afrique de l’Ouest, en marquant le passage d’une riposte fragmentée à une véritable stratégie commune.
Mais entre la volonté affichée et la réalité du terrain, le chemin reste long. Les populations, elles, attendent des actes concrets et des résultats palpables. Car chaque jour, dans le Sahel et ailleurs, ce sont des vies qui continuent de s’éteindre sous la violence aveugle des groupes armés.
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Moise Touré
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Source: Bamada.net
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