Le mardi 8 juillet 2025, la Cour d’assises spéciale de Bamako a rendu son verdict dans l’affaire très médiatisée de l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires. Cette procédure judiciaire, qui s’est déroulée sur plusieurs semaines, impliquait de nombreuses personnalités politiques, militaires et économiques de l’ancien régime. À l’issue des audiences, des peines particulièrement lourdes ont été prononcées à l’encontre de plusieurs accusés, tandis que d’autres ont été acquittés.
Bamada.net-Au cœur de cette affaire, Madame Bouaré Fily Sissoko, ancienne ministre de l’Économie et des Finances sous la présidence d’Ibrahim Boubacar Keïta, a été condamnée à dix ans de prison ferme. La cour l’a également condamnée à payer une amende de 500 000 francs CFA. Cette décision est intervenue après que le parquet général a requis contre elle une peine beaucoup plus sévère : vingt ans de réclusion criminelle. Le ministère public a justifié cette réquisition par la « responsabilité écrasante » de l’ancienne ministre dans les décisions ayant conduit à des détournements et irrégularités majeures dans l’exécution des contrats publics. Toutefois, la Cour a opté pour une peine réduite, prenant certainement en compte les quatre années déjà passées en détention préventive. Il lui resterait donc six ans à purger.
Dans la même affaire, le colonel-major Nouhoum Dabitao, ancien directeur du Commissariat des armées, a été condamné à sept ans de prison ferme, assortis d’une amende de 300 000 francs CFA. Lors de son audition, l’officier a précisé que ses fonctions à l’époque ne lui permettaient pas d’évaluer la conformité des prix ou la pertinence des achats, son rôle étant uniquement logistique. Il devait s’assurer de la livraison des équipements prévus, notamment ceux du lot n°1 du protocole GUO Star SARL, relatif aux matériels HCCA. Malgré cette défense, la Cour a jugé qu’il avait failli à ses obligations de contrôle.
Les peines les plus lourdes ont été prononcées par contumace. Ainsi, Moustapha Ben Barka, ancien ministre, et Sidy Mohamed Kagnassy, homme d’affaires très influent sous le régime IBK, ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité. Tous deux étaient absents lors du procès. Il faut souligner que Moustapha Ben Barka était un proche familial de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta. Son nom est souvent revenu dans les différents dossiers liés aux contrats opaques signés durant cette période.
Deux autres accusés majeurs, Amadou Baïba Kouma et Nouhoum Kouma, dirigeants de la société GUO Star SARL, ont également été condamnés à la réclusion à perpétuité par contumace. Cette société, au cœur des contrats incriminés, est soupçonnée d’avoir été l’instrument par lequel plusieurs surfacturations ont été opérées, dans le cadre des acquisitions militaires.
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En revanche, la Cour a prononcé l’acquittement de deux personnalités importantes : Mahamadou Camara, ancien ministre et directeur de cabinet à la Présidence en 2014, et le général de brigade Moustapha Drabo, ancien directeur de la Direction du matériel, des hydrocarbures et des transports des armées (DMHTA). Le parquet avait lui-même requis leur acquittement, estimant qu’il n’existait pas d’éléments suffisamment probants pour établir leur culpabilité. La Cour a suivi cette orientation et les a déclarés non coupables.
Ce procès, emblématique de la lutte contre l’impunité dans la gestion des affaires publiques, est vu par de nombreux observateurs comme un tournant dans l’histoire judiciaire du Mali. Il constitue l’un des procès les plus retentissants de la période post-IBK et reflète une volonté manifeste des autorités de la Transition de traduire en justice les cas de malversations économiques les plus emblématiques.
La tenue de ce procès et les peines prononcées suscitent cependant des réactions partagées. Si certains y voient un acte de justice salutaire, d’autres dénoncent ce qu’ils considèrent comme des règlements de comptes politiques. Les avocats de certains condamnés ont d’ores et déjà annoncé leur intention de faire appel. Le dossier pourrait donc être de nouveau examiné devant une juridiction supérieure.
En attendant, l’exécution des peines devrait suivre son cours, notamment pour les accusés déjà détenus. Pour les condamnés par contumace, des mandats d’arrêt internationaux pourraient être lancés.
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Source: Bamada.net
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