Alors que l’on s’attendait à une peine plus clémente, la Cour d’assises spéciale a rendu son verdict.
Si les magistrats n’ont pas totalement suivi les réquisitions du parquet, qui avait requis 20 ans de prison contre l’ancienne ministre, Bouaré Fily Sissoko a tout de même été condamnée à 10 ans de réclusion.
Après près de quatre années de procédures, la Cour d’assises spéciale a rendu son verdict dans le retentissant dossier de l’acquisition de l’avion présidentiel et des équipements militaires. À l’issue de ce procès marathon, l’ancien directeur de cabinet du président Ibrahim Boubacar Keïta, Mahamadou Camara, ainsi que le général de brigade Moustapha Drabo (à l’époque des faits Directeur du matériel, des hydrocarbures, du transport des Armées, Ndlr), ont été déclarés non coupables des faits d’atteinte aux biens publics.
Le tribunal a estimé que les éléments à charge contre les deux prévenus ne suffisaient pas à établir leur responsabilité pénale. Leur libération marque une étape décisive dans cette affaire emblématique des dérives de la gestion publique sous l’ancien régime. En revanche, la Cour a reconnu coupables l’ancienne ministre de l’Économie et des Finances, Bouaré Fily Sissoko condamnée à 10 ans de prison ferme tandis que le colonel-major Nouhoum Dabitao (Directeur du Commissariat des Armées, au moment des faits, Ndlr) écope de 7 ans d’emprisonnement ferme.
De «lourdes condamnations» dans les deux volets du dossier selon leurs supporters qui dénoncent un procès politique. Rappelons que les irrégularités financières reprochées aux condamnés sont accablantes : pour un contrat initialement évalué à 15 milliards de FCFA concernant l’achat de l’avion, ce sont finalement 21 milliards qui ont été décaissés, sans justification claire, pendant que des techniciens qualifiés ont été marginalisés dans le processus décisionnel.
Quant au volet des équipements militaires, le flou reste entier. Aucun document officiel exprimant les besoins des forces armées n’a précédé la signature des contrats. «On a fait des contrats sur le dos des bénéficiaires eux-mêmes», a dénoncé un haut gradé entendu au cours du procès. Même l’état-major général, à l’époque, n’aurait pas été consulté. Les équipements livrés ne correspondaient ni aux attentes ni aux besoins exprimés par les militaires, certains documents étant qualifiés de «faux» et «corrompus».
Ce procès met en lumière une série de dysfonctionnements graves dans la passation des marchés publics et dans la gouvernance sécuritaire d’un pays confronté à de multiples défis. Une affaire qui, au-delà des prétoires, interroge sur les responsabilités politiques et institutionnelles dans la gestion des ressources publiques.
Hachi Cissé
Source:Le Matin
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